Quand j’étais ado, se faire une journée de shopping « à la Pretty Woman » était un fantasme que je partageais avec plusieurs amies. Chacune visualisait la scène mythique, se rêvait en Julia Roberts, les bras chargés de sacs remplis de vêtements de luxe. Avec mon tempérament de flambeuse et mon goût pour la sape, j’aurais tout donné pour vivre un moment aussi jouissif.
Aujourd’hui, mes aspirations sont différentes. Pourtant, quand je viens à Paris, mes journées comportent une dose non négligeable de shopping. Je continue d’acheter et d’aimer ça. Le plaisir de m’offrir de belles choses est toujours là. Mais, avec la maturité et grâce à un gros travail introspectif, j’ai appris à limiter la casse, c’est-à-dire mes compulsions, dévastatrices tant pour mes finances que pour mon estime personnelle. Le processus est toujours en cours, avec son lot de dérapages et d’ajustements nécessaires. « Comment acheter ? » est une question que je continue de me poser. Je l’ajoute donc à ma liste de questionnements récurrents et vous dis où j’en suis. Comme d’habitude, n’hésitez pas à m’écrire comment vous faites de votre côté…
L’autolimitation nécessaire
L’autolimitation crée un espace entre le désir et la consommation, une nécessité dans notre monde moderne surchargé de sollicitations, dit en substance la psychiatre Anna Lembke à la fin de son livre Un monde sous dopamine. Cette phrase synthétise mon approche de l’acte d’achat. Nous évoluons dans un environnement pensé pour nous pousser à consommer. Comment préserver notre libre-arbitre ? En posant nos propres filtres, en accord avec nos moyens, nos goûts, notre style de vie, nos convictions.
Mon principal rempart : prendre le temps
Mes plus grosses erreurs d’achat, je les ai faites dans la précipitation. Si j’attendais, je craignais « qu’il n’y en ait plus ». Mais la peur est mauvaise conseillère, et l’urgence crée une pression qui me pousse aux mauvais choix. Pour m’en prémunir, j’ai fini par mettre en place un protocole personnel. Quand une envie ou un besoin se fait sentir, dans ma tête, j’ouvre un dossier. Je crée un espace, je mets quelque chose entre mon désir et ma consommation, pour reprendre les mots d’Anna Lembke.
Ce dossier signifie que je vais mettre des jours, voire des semaines ou des mois à me décider. Parfois, j’ouvre un doc Word. J’y note une référence, puis je la compare avec ce que font d’autres marques. Même sûre de mon choix, je dors au moins une nuit dessus. Une fois sur deux, le lendemain, j’ai oublié mon envie, ou bien j’ai changé d’avis, ou bien mon envie a été remplacée par une autre envie.
Vous m’aidez
J’aime vous consulter. Ce fut particulièrement le cas au moment de notre installation à Montélimar. On changeait de vie, on avait toute une déco à repenser. « Qu’est-ce que vous vous prenez la tête », m’écrivaient des lectrices éberluées par mes tergiversations. Mais je voulais acheter en conscience, afin de limiter les regrets : avec chaque lampe, chaque meuble, on en prenait pour 20 ans. Trois ans et demi après notre installation, la plupart de nos investissements se sont avérés justes. Merci pour vos recommandations !
Elles ne concernent pas que l’ameublement. Vendredi dernier, j’ai évoqué ici ma décision d’acheter un séchoir diffuseur pour mieux former mes boucles. Je n’y connaissais rien. Vous avez été nombreuses à m’aiguiller. Finalement, je me suis arrêtée sur un simple embout universel, à fixer sur mon séchoir habituel. Une fois encore, merci. J’ai repéré le produit qui me convient, je n’ai plus qu’à cliquer pour l’acheter, mais j’attends encore un peu, juste pour être tout à fait sûre.
Je n’aime pas acheter en ligne
Un autre filtre naturel m’est apparu le jour où j’ai compris que l’achat en ligne me procurait beaucoup moins de plaisir que l’achat en magasin. J’ai besoin de regarder, de toucher, de comparer, d’hésiter, d’aller et venir, de discuter avec un vendeur, de sentir l’atmosphère de la boutique. J’aime les commerçants, j’ai envie de soutenir leurs investissements physiques, fragilisés par l’avènement du numérique. Et je crois beaucoup à la force des liens faibles, ces contacts brefs et occasionnels, avec des gens que l’on ne connaît pas ou peu, qui sont pourtant essentiels à notre équilibre. Dans les cabines d’essayage, je suis toujours ravie de donner mon avis à une cliente qui peine à faire son choix. Récemment, j’ai passé dix minutes au rayon moules de Grand Frais, à comparer leurs provenances avec un papy qui les avait toutes testées. J’aime qu’un achat soit l’occasion de parler à des gens.
À l’inverse, j’ai du mal avec les livraisons. L’expérience n’est pas agréable, ce sont des frais, il y a le risque que le produit ne convienne pas, ou bien qu’il arrive endommagé. Et puis on sent les livreurs sous pression. Sans compter la pollution du dernier kilomètre, qui m’incite à opter pour les points de retrait, souvent des casiers qui limitent encore davantage les contacts humains. C’est pratique et j’y ai parfois recours, mais plus j’avance en âge, plus je me méfie de ce qui est pratique : une dose d’effort s’avère souvent plus bénéfique. Voilà comment, à chaque voyage à Paris, je me retrouve avec une liste de courses remplie de références que je préfère aller acheter en boutique, même quand je pourrais me faire livrer chez moi.
Le graal : choisir une fois pour toutes
Qu’il s’agisse d’un vêtement ou d’un stylo, d’un verre ou d’une boîte de sardines, mon but est de trouver LE produit qui me convient et qui restera disponible en permanence, afin de pouvoir, le moment venu, le remplacer sans avoir à réfléchir. Autrement dit, j’investis le temps nécessaire au début pour étudier le marché, puis ce n’est plus un sujet.
Ainsi, quand je me suis mise à manger des sardines le matin, j’ai testé plein de marques, étudié le taux de sel, les prix, les avis Yuka, puis j’ai fait mon choix. Depuis, je mange les mêmes sardines au citron un matin sur trois.
Avec les fringues, c’est forcément plus complexe, mais j’évoquais déjà lors de mon point saisonnier mon approche de plus en plus rationnelle et utilitaire, laquelle s’avère un très bon antidote aux craquages.
Les limbes de la fatigue décisionnelle
Les journées n’ayant que 24h, le temps me manque pour étudier tous mes dossiers en cours. Les moins excitants et les moins pressants tombent dans les limbes de la fatigue décisionnelle, ce qui constitue une autre forme de protection indolore contre mon côté dépensier – sous contrôle mais toujours prêt à resurgir. Ma coque d’iPhone est déchirée, ça m’agace mais j’ai la flemme d’en chercher une autre. Mes dernières chaussures de running m’ont paru trop chères pour ce qu’elles étaient, il est temps que je les remplace, j’ai repéré un modèle sur le site de Décathlon, mais j’ai toujours mieux à faire que d’aller les essayer.
Ma faiblesse : les livres et la nourriture
Mon tour d’horizon serait incomplet sans mes irréductibles craquages, en librairie ou dans les commerces de bouche. Je vous l’avais déjà dit : en dépit de toutes mes tactiques, je reste bien faible face à un beau livre d’art. Et j’ai le plus grand mal à ressortir les mains vides d’une épicerie italienne. Mais j’ai une excuse : je cherche la meilleure huile d’olive à la truffe !
Atelier Oser se montrer sur les réseaux sociaux
Live mercredi 14 mai de 19h à 20h30 sur Zoom - 43€
Mercredi prochain, je vous propose un nouvel atelier en ligne pour apprivoiser son image. Que l’on ait envie de le faire uniquement pour se reconnecter à soi ou pour communiquer plus librement, se confronter à un réseau social peut s’avérer très utile dans la levée des blocages.
Mon live d’écriture d’hier constituait une sorte d’échauffement. Le replay est en accès libre.
Programme de l’atelier
Pourquoi est-il si difficile de se montrer ? Les raisons d’un conditionnement
Commencer par faire des photos pour soi-même, pas pour les réseaux sociaux
Se montrer : une liberté, pas une obligation
Mon témoignage en images : comment ça s’est passé pour moi
Quelques bonnes raisons de se photographier
Dépasser l’étrangeté de sa propre image pour devenir son propre matériau
En finir avec la question de la photogénie
Exercice pratique : oser faire un selfie seulement pour soi
Mes conseils pour un bon autoportrait
Action ! L’atelier se poursuit dans le groupe WhatsApp.
Tarif et informations pratiques
L’inscription de 43 euros vous donne accès :
Au live d’1h de cours suivi de 30 minutes de questions-réponses
Au replay permanent
Au support écrit
Au groupe WhatsApp Matières à réflexion.
Je vous donne rendez-vous sur mon compte Instagram ce lundi 12 mai à 19h pour un court live de présentation de l’atelier de mercredi.
Qui suis-je ?
Vous venez de découvrir ma lettre ? Bienvenue ! Je me présente. Je m’appelle Géraldine Dormoy, je suis journaliste et coach digitale. J’écris cette newsletter, De beaux lendemains, deux fois par semaine. Celle du vendredi, sur mon humeur du moment, est gratuite. Celle du dimanche, sur des ressources qui me nourrissent, est payante (6€/mois, 5€ avec la formule annuelle). J’organise aussi des ateliers en ligne pour mieux se connaître. Depuis 2021, j’habite dans la Drôme, à Montélimar, avec mon mari Mark Tungate et notre fils Gustave. Avant, j’habitais près de Paris. J’ai été 10 ans journaliste à L’Express, j’ai aussi collaboré au magazine Marie Claire et écrit deux livres : Un cancer pas si grave et L’âge bête. Vous pouvez me suivre sur Instagram et LinkedIn.
MERCI, je me sens moins seule avec mes noeuds au cerveau sur la consommation. Je suis assez persuadée que décider à qui on donne notre argent, comment, pourquoi est éminemment politique. Au delà de mes envies, mes critères sont donc écologiques, sociaux, éthiques : où est fabriqué l’objet/vetement, dans quelles conditions, materiau, pour la nourriture, est-ce que cela assure une rémunération juste du producteur? Dans un magasin ou un restaurant, si le patron parle mal à ses employés, je quitte les lieux. Cette exigence s’applique aussi à la consommation de services : pas d’entreprises qui mettent à mal le modèle social français. (Pas d’amazon, Airbnb, Netflix etc) Bref ma famille me déteste 😂 mais comme moi je l’aime, pour elle, je peux oublier tous mes principes. Aussi le monde d’aujourd’hui ne facilite pas les choses, (tête du gars d’orange quand vous refusez le téléphone neuf auquel vous avez droit pour un reconditionné). Bref cela me fait penser à votre NL qui parlait de faire les choses même si on savait qu’on n’allait pas forcément y arriver (pardon pour le résumé un peu hâtif de votre pensée plus subtile), eh bien pour la consommation c’est exactement ce que je vis. Je sais que c’est voué à l’échec mais j’essaye chaque jour. Et sinon, géniale la référence sur les liens faibles, je crois beaucoup à ça, je ne savais pas que cela a été théorisé. Vous savez, vous devriez écrire une sorte de guide. Pour chaque situation/questionnement hop la référence de tel auteur, sociologue, peintre.
J'ai un budget mensuel pour mes achats personnels, donc ca pose toujours une limite. Je pense longtemps a mes achats, mais j'accepte de me tromper et donc de donner quand ca ne va pas. Je pense que si l'on accepte pas l'erreur, ca met trop de pression sur nous-meme et les objets. Accepter de se tromper, de perdre de l'argent, de changer d'avis, d'apprendre et d'experimenter, aide a désacraliser le process. La créativité nécessite de tolérer les erreurs. Ca j'ai mis du temps a le comprendre et m'enlever cette pression. J'avais un mindset de la peur du manque, et je me tendais pour beaucoup de choses. Maintenant, ca va mieux. Money comes, money goes.