À la lecture de Slow Productivity la semaine dernière, un point a retenu mon attention, mais n’a pas trouvé sa place dans ma newsletter dominicale. Dans son livre, Cal Newport énonce trois principes pour passer à une productivité plus lente et plus épanouissante : en faire moins, adopter un rythme naturel et développer une obsession pour la qualité. Pour passer à un rythme plus naturel, il nous suggère de concevoir un plan à cinq ans. Selon lui, l’exercice permet de s’inscrire dans une vision à long terme (en réalité, peu importe la durée, l’essentiel est que notre horizon temporel s’étende sur plusieurs années).
Son raisonnement est le suivant : un tel plan permet de s’interroger sur ce que l’on aimerait accomplir dans le temps imparti, cela nous aide à définir nos objectifs et à y revenir, mais cela nous donne aussi l’espace dont on a besoin pour se sentir à l’aise quand on ne progresse pas, sur le moment, vers son but. Une perspective longue inclut les interludes, les impasses, les détours. « J’ai pu me livrer à des explorations sans avoir le sentiment de renoncer », témoigne l’auteur lorsqu’il évoque son propre parcours d’écrivain. Délestée de toute pression, cela m’a donné envie de me projeter.
Dans cinq ans, en 2030, notre fils aura 19 ans. Puisque nous habitons Montélimar, une petite ville dans laquelle nous sommes bien et que nous ne prévoyons pas de quitter, Gustave sera sûrement parti étudier ailleurs. Me projeter à cinq ans, c’est donc envisager le retour à une vie à deux. Cette perspective m’excite, car elle est synonyme de changement, et j’adore les changements.
Cela peut sembler en contradiction avec mon goût des habitudes et des rituels, mais pour moi les deux vont de pair au contraire : c’est parce que mon quotidien est rendu stable et fluide par mes routines que je peux envisager des évolutions majeures. Je me sens armée, j’ai les ressources internes pour m’y adapter, je les recherche car l’expérience m’a appris que c’est dans le mouvement que je progresse.
Dans cinq ans donc, tout porte à croire que nous serons libres d’aller et venir. Mark travaille en effet déjà intégralement à distance. Qu’il soit alors encore salarié de la même entreprise ou qu’il soit entre temps redevenu journaliste indépendant, il pourra écrire de n’importe où. Idem pour moi : je prévois de continuer de développer mes newsletters, mon coaching digital et mes ateliers, trois activités que je peux mener d’où je veux.
Cette liberté de mouvement sonne pour moi comme une invitation au voyage, mais un type de voyage différent de ce que nous avons expérimenté jusque-là. Moi qui suis actuellement plutôt adepte des séjours courts, je rêverais que notre prochain mode de vie s’articule autour de séjours où l’on prendrait le temps de se poser pour ressentir. Il ne s’agirait pas de lieux très touristiques, tant pour des questions de budget que de rythme de vie. Car mon but, dans tous les cas, serait le même qu’aujourd’hui : continuer de passer mes journées à lire et à écrire. Dans mes rêves les plus fous, je nous imagine donc « en résidence », dans des contrées que nous n’avons jusqu’à présent pas encore eu le temps d’explorer suffisamment, qui m’attirent et dont j’aimerais m’imprégner. Certaines lointaines, en Afrique, en Amérique du Sud ou en Asie, d’autres beaucoup plus proches (les Pyrénées, la Bretagne, l’Alsace, les Landes, la Corse, l’Italie…).
Et comme, dans mon cas, le pro et le perso se tissent ensemble, j’imagine faire évoluer mes newsletters dans ce sens. Renouer avec le reportage, mêler images et textes, poursuivre mon journal sous la forme d’un carnet de voyage existentiel. Vous embarquer, interagir en ligne avec vous en fonction de l’évolution des technologies, vous rencontrer sur place.
Je crois très fort que mes newsletters seront de plus en plus lues, mais je sens également que mes relations avec vous emprunteront d’autres chemins. Il règne une atmosphère étonnante dans le groupe WhatsApp que j’ai créé, Matières à réflexion (accessible aux personnes qui se sont abonnées annuellement à ma newsletter payante). J’y interviens peu, mais les lectrices et lecteurs présents y sont engagés, l’énergie collective y est palpable. Nos conversations me confortent dans l’utopie que je chéris : celle de bâtir ensemble notre chemin introspectif. Chaque parcours est unique, mais nous sommes relié.es, et certain.es d’entre vous me signifient clairement qu’ils/elles sont prêt.es à aller plus loin. Je ne sais pas où tout cela nous mènera, mais je me tiens ouverte, à l’écoute.
J’ai récemment réalisé qu’ado, je ne savais pas trop ce que je voulais faire « plus tard ». En revanche, j’étais sûre d’une chose : je ne voulais pas faire comme tout le monde. Je voulais trouver une façon de faire différente, qui n’appartiendrait qu’à moi. Je voulais m’inventer, sans trop savoir comment. C’était très flou. Ça l’est encore. La différence avec hier, c’est que je l’accepte. J’ai compris que mon identité, mes goûts, mes enthousiasmes sont mouvants, et que l’on peut avancer ainsi, en cultivant agilité, rigueur, sincérité.
Un livre ? Peut-être plus tard. Il me semble que j’ai encore besoin de digérer beaucoup de choses avant de me lancer dans un tel projet. J’ai beau être venue à bout de deux ouvrages, aujourd’hui je ne me perçois pas comme une écrivaine. Je n’aspire pas à écrire des livres, à avoir un style, une plume, une identité littéraire. L’écriture est pour moi un moyen, pas une fin. Mon moyen d’expression, l’outil par lequel tout se révèle. Je lui accorde donc une place centrale dans ma vie, mais elle a quelque chose d’usuel, de quotidien, je ne la sacralise pas.
Assouplie par la pratique, l’écriture m’est devenue plus naturelle, mais je n’ai pas pour autant envie de replonger dans la souffrance qu’implique l’écriture d’un livre. Car oui, pour moi, écrire un livre est une souffrance. C’est difficile pour tout le monde, mais je crois que dans mon cas, cela tord ma nature, qui me porte plutôt vers des textes courts. Charlotte Moreau en parle très bien dans un podcast que j’écoutais ce matin : elle et moi sommes avant tout des journalistes et des blogueuses, c’est de là que nous venons. Nous sommes plus à l’aise dans les reportages, les billets d’humeur, les formats digitaux qui permettent des interactions immédiates et régulières avec vous, nos lectrices et lecteurs. C’est vrai aujourd’hui, je parie que ce sera encore le cas dans cinq ans. Rendez-vous en 2030 !
Et vous, où vous imaginez-vous à cet horizon ? Racontez-moi, en commentaire ou par mail.
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J’envoie deux newsletters par semaine. La première, le vendredi, est gratuite. J’y raconte mon cheminement intérieur à ciel ouvert. La seconde, le dimanche, est payante. J’y présente une ressource, la plupart du temps un livre que je viens de (re)lire et qui m’a nourrie. Vous pouvez vous y abonner pour 6€ par mois (5€ avec la formule annuelle). Vous aurez alors aussi accès aux archives.
Ce dimanche par exemple, je vous parlerai des 25 règles d’or de la préparation mentale, de Thomas Sammut (éd. Solar).
Dans 5 ans je serai à l’aube de mes 60 ans… rien que de l’écrire cela me semble surréaliste… et pourtant ! Un peu comme quand on envisageait l’an 2000 ! J’ai un peu de mal à me projeter aussi loin, mais en faisant cet effort, je ferme les yeux, je cherche à trouver le moyen de subir moins le temps du travail, je mets mes « loisirs » la lecture, l’écriture, la marche, la contemplation…au centre de ma vie… je travaille à trouver ce fragile équilibre entre gagner ma vie et la vivre paisiblement !!
Ton objectif de voyager « long » est inspirant, je n’aime pas partir en vacances du fait du temps court qui induit un rythme trop rapide pour moi, je privilégie la lenteur dans ma vie pour étirer le temps, aussi partir longtemps permet cette lenteur. Très chouette objectif.
Ah, je comprends l'envie de se "poser" quelque temps ailleurs. J'ai toujours beaucoup de mal avec le côté "consommation-compétition" d'une certaine forme de tourisme. Et sinon, moi j'aurais plutôt tendance à faire l'exercice inverse. Prendre un événement, un moment et me rappeler où j'en étais 5 ans avant. 😉